La communication pour les élus

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INTERVIEW de Yves-Marie ROBIN

Responsable du secteur politique et adjoint du chef du service France
chez Ouest-France. Ancien reporter terrain politique.

FANNY DESTENAY

Yves-Marie Robin, pourriez-vous me parler de votre parcours ?

YVES-MARIE ROBIN

Aujourd’hui, je suis rédacteur en chef au service politique nationale à Rennes et j'ai fait plusieurs années sur le terrain, dans les rédactions locales. J'étais régulièrement en contact avec les maires ou leurs chargés de com’. Par le passé, je me suis parfois heurté à des maires qui craignaient la presse et qui s’exprimaient peu. Certains ne sont vraiment pas à l'aise. Je trouve qu'un livre pour les aider à communiquer, c’est une bonne idée.

FANNY DESTENAY

En 2022, j’ai écrit un livre sur les élections législatives dans lequel j’avais abordé la relation entre le candidat et la presse en période de campagne. Aujourd’hui, je m’intéresse à la relation entre l’élu et la presse entre deux élections, en période dite normale. J’aimerais savoir comment des élus, par exemple des maires de villages, peuvent se rendre suffisamment intéressants auprès de la presse quotidienne régionale (PQR) pour obtenir un reportage soit sur eux, soit sur leur commune.

YVES-MARIE ROBIN

Les rédactions essayent d’avoir des correspondants dans toutes les communes, mais dans certains villages, il ne se passe pas grand-chose, donc il n'y a pas grand-chose à raconter. Parfois, le travail quotidien des maires peut intéresser nos lecteurs. Par exemple, nous avons eu un sujet récemment sur la question de la pénurie des secrétaires de mairie. Ça a donné lieu à quelques reportages pour expliquer le quotidien des plus petits maires qui n'ont pas beaucoup de moyens et qui travaillent presque à temps plein. Ils sont obligés de tout faire eux-mêmes dans leur commune.

FANNY DESTENAY

Quand vous traitez un sujet comme celui-là, est-ce que vous allez chercher des maires ou il y en a qui vous contactent en voulant apporter leur témoignage spontanément ?

YVES-MARIE ROBIN

Ah non, pas du tout. C'est à nous de les chercher. Eux ne viennent pas vers nous. Quand je travaillais en rédaction, je me souviens que dans les villes, ils savaient communiquer. En général, ils nous envoyaient leur agenda, mais autrement, sur des sujets précis, c'était à nous de les contacter. Les maires ne se vendent pas facilement. Quand je recevais l’agenda d’un maire, la plupart du temps, c’est que j’avais eu un contact précédemment avec lui. Il y en avait d’autres qui communiquaient beaucoup par communiqué de presse. Ça dépendait des maires. Les communiqués de presse, nous les recevions soit par des agences, soit par leur service de communication directement quand on était dans leur liste de diffusion. Pour les journalistes de presse locale, ça peut donner lieu à quelques sujets.

J'ai le souvenir que lorsqu’il y avait un décès particulier, d'intérêt national, on les sollicitait. Ou encore, je me souviens avoir contacté des maires quand il y avait eu un referendum sur une question autour des zones à faibles émissions. Je les avais également sollicités parce que lors d'une fête de mariage, il y avait eu des débordements dans une commune, ce qui avait donné lieu à des sujets. Mais malheureusement, presque aucun ne nous appelle pour nous dire « voilà ce qu'on fait de bien, est-ce que ça vous intéresse ? »

FANNY DESTENAY

Quand il y a des sujets nationaux, est-ce que si un maire venait vers vous en voulant apporter son témoignage vous les prendriez ?

YVES-MARIE ROBIN

Oui, complètement. Si les maires nous contactent sur des sujets d'actualité, pourquoi pas. Mais aujourd'hui, c'est plutôt l'inverse. Je sollicite souvent l'Association des maires de France (AMF) pour savoir s'ils ont un courriel à me transmettre. Par exemple, dernièrement, quand il y a eu les annonces du déficit public et des possibles pistes sur la réduction des dotations aux communes, j’ai demandé à l’AMF les coordonnées de maires. Sans l’AMF, je n’aurais pas su vers qui me tourner. J'aurais aussi pu contacter des maires que je connaissais, mais on ne veut pas une multitude d’interlocuteurs.

FANNY DESTENAY

Ce qui veut dire que vous avez une liste de maires et de communes qui représentent bien la France, avec qui vous avez de bonnes relations et que vous interrogez souvent, un peu par confort, je dirais ?

YVES-MARIE ROBIN

Il y a des maires qui parlent plus facilement et qu’on voit à la télé. Ils ont une parole intéressante, donc nous les sollicitons plus facilement, mais mon interlocuteur principal, c'est plutôt l'AMF.

FANNY DESTENAY

Sans dire que la presse ne s'intéresse qu'aux trains qui arrivent en retard, est-ce qu'il y a des sujets plus positifs qui vous plaisent et que vous aimez mettre en avant ? Sans que ce soit forcément lié à une catastrophe ou à un événement négatif ?

YVES-MARIE ROBIN

Oui, bien sûr. Quand on est journaliste en rédaction locale, on s'intéresse à tous les sujets. Par exemple, des sujets d'aménagement urbain, des sujets d'innovation autour de l'environnement. Nous essayons de toucher le lecteur par des sujets du quotidien. Des sujets sur le cadre de vie, ça nous intéresse également. Quand il y a de gros projets qui naissent, par exemple, les maires nous informent via leur agenda ou via leur chargé de com’.
Sur les sujets plus dérangeants, effectivement, ils sont moins présents. Et puis, à mesure que la campagne des élections municipales va approcher, ils vont de plus en plus communiquer sur leurs réalisations. Parfois, on prend un peu de recul par rapport à des chantiers réalisés dans les communes qu’on aurait pu traiter en quelques lignes. Mais sur un sujet d'aménagement urbain par exemple, ça nous intéresse plus.

FANNY DESTENAY

Et vous abordiez le sujet des élections municipales. Les règles en période de campagne sont différentes, car vous devez accorder la même importance à chaque candidat, donc si vous écrivez la moindre ligne sur un candidat, vous devez le faire pour tous les autres ?

YVES-MARIE ROBIN

Quand il y a des élections municipales, effectivement, on présente chaque candidat et leurs propositions. Généralement, on organise des débats entre les candidats en lice. On fait beaucoup de multimédias avec des vidéos ou des présentations des candidats. Ce qui est sûr, c’est que le maire sortant est un peu plus avantagé parce que l’on continue de parler des conseils municipaux, qui ne s’arrêtent pas. Mais je pense qu'à un an ou à quelques mois des municipales, il faut faire attention à ne pas trop glorifier le bilan du maire sortant, ou, en tout cas, ses dernières réalisations qu'il va forcément mettre en avant.

Je vois l'exemple de Brest où ils sont en train de construire un deuxième tramway. Normalement, les travaux doivent se terminer pour février 2026. On sera obligé d'en parler, même si c'est une réalisation d'une maire sortante, parce que ça va impacter le quotidien des habitants. Donc, on n'est pas dupe du calendrier lié à des travaux aussi importants dans une ville.

FANNY DESTENAY

Et pour les petites communes, est-ce que vous organisez quelque chose lors des élections ?

YVES-MARIE ROBIN

En général, dans les petites communes, il y a un, voire deux candidats. Aujourd'hui, avec ce qui se passe auprès des maires [Ndlr : la montée des violences envers les élus], il n’y a plus beaucoup de candidats dans les petites communes. Donc, on demande à nos correspondants de présenter au minimum les candidats et leurs programmes. Nous avons des lecteurs partout, donc nous sommes obligés de faire un sujet dans chaque petite commune. On présente tous les candidats de toutes les communes.

FANNY DESTENAY

Côté publicité payante, est-ce que vous acceptez les publireportages ? [Ndlr :un publireportage est un article écrit par l’annonceur lui-même, pour parler d’un sujet qui peut intéresser le lecteur. Aux frais de l’annonceur.]

YVES-MARIE ROBIN

Non, jamais. Il y a des publicités qu'on décide de ne pas prendre. À la rigueur, on peut mettre notre logo sur l’affiche d’un événement si on est partenaire, mais on ne prend pas ce type de publicité.

FANNY DESTENAY

D'accord. Est-ce qu’il y a autre chose que vous voudriez ajouter ?

YVES-MARIE ROBIN

On est toujours preneurs de bonnes infos. On découvre parfois des sujets intéressants a posteriori alors que, si on nous avait informés en amont, on aurait fait un sujet dessus. Il ne faut pas craindre les médias. Quand on est élu, il ne faut pas craindre de se vendre. Envoyez un communiqué de presse. Au pire, on ne répondra pas, et au mieux, on fera un sujet sur votre commune. Dites-nous quand vous innovez, n’hésitez pas à communiquer, on fera un tri, mais il faut que les maires vendent leur commune auprès de la presse.

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